Kafka devant le CRA


Cette fois encore, nous sommes confrontées au problème « consul ». En effet, arrivées de bonne heure, nous sommes rapidement introduites au parloir, où on nous annonce qu’il faut repartir : le consul d’Algérie est là et il est hors de question d’avoir ensemble des visites privées et celle du consul. Dépitées, nous faisons demi-tour, sortons pour patienter et bien sûr, nous taillons une bavette avec les autres visiteurs, dont un majestueux Africain.


L’histoire de ce Malien, appelons le Monsieur X., est stupéfiante, et le mot est faible. Titulaire d’une carte de séjour espagnole, il se rend au pays pour mettre sa famille, qui habite Ségou, à l’abri à Bamako, pendant « les évènements ». Pour pourvoir à leurs besoins, il se rend en France et s’inscrit à Pôle Emploi, où on lui affirme qu’il peut travailler avec sa carte de séjour espagnole !!! Ce dernier service téléphone en Espagne pour s’assurer de la validité de sa carte : pas de problème, la carte est valide. Notre homme est inscrit. Mais patatras ! L’employeur, auprès de qui il a trouvé un emploi, et qui connaît mieux les règles que Pôle emploi, lui déclare que cette carte n’est pas valable en France.
Il retourne voir Pôle Emploi qui s’avise qu’une carte espagnole ne permet de s’inscrire dans ses services !..
Monsieur X. parle et lit le français et il cherche à faire valoir ses droits, qu’il connait. Ayant épuisé les recours contre Pôle Emploi en France, il se rend en Espagne pour renouveler sa carte, et là, re-patatras ! Les Espagnols lui signifient que, s’étant inscrit à Pôle Emploi (ils le savent, via le coup de téléphone …) il ne peut pas renouveler sa carte espagnole !

Cerise sur le gâteau : Monsieur X., de retour en France se rend encore une fois à la Pôle Emploi pour tenter de faire valoir ses droits et tenter de faire réparer l'erreur dont il est la victime. On lui a promis un papier destiné aux services espagnols attestant que son inscription est due à une erreur. Pôle Emploi appelle la police : Monsieur X. est enfermé au CRA.


Aujourd’hui, il vient d’être libéré, il patiente dehors pour pouvoir récupérer ses affaires ; et comme c’est la même équipe qui gère les visites et la remise des affaires aux libérés, il fait comme nous, il patiente plusieurs heures…


Il a tout perdu, mais il a gagné l'obligation de quitter le territoire français que la préfecture n'a pas hésité à lui signifié. Il peut maintenant être arrêté et mis en rétention à tout moment. Le juge qui l'a libéré lui a conseillé de se trouver un avocat pour résoudre son affaire. Il va donc chercher un travail, au noir, pour gagner l'argent qui lui permettra de le payer.

Et vogue la galère...